Le blason de Cortaillod puise son origine dans l’histoire locale du XVIIe siècle. Les premières traces connues de ces armoiries communales remontent à 1633 : cette date figure sur l’ancienne porte de la cure (le presbytère) de Cortaillod, où était sculpté un écu portant déjà la croix pattée accompagnée d’un croissant. De part et d’autre du blason, les gouverneurs de la paroisse de l’époque, nommés Henry et Mentha, avaient fait graver leurs initiales avec l’année 1633. Cela indique qu’à cette date, la communauté locale s’était dotée d’un emblème visuel identifiable. Sans doute à l’occasion de la construction ou de la rénovation d’un bâtiment important (l’église ou la cure) afin de marquer son identité et son patrimoine spirituel.
Au XVIIIe siècle, le blason de Cortaillod apparaît à plusieurs reprises, ce qui permet de suivre son évolution. En 1722, une nouvelle sculpture au motif du blason est réalisée pour orner le mur de l’église. Sur cette version, le croissant d’or s’inscrit directement sur la croix, formant comme mentionné un C imbriqué dans la croix. Cette stylisation souligne l’importance symbolique de l’initiale de la commune à travers le croissant. Quelques décennies plus tard, en 1761, Cortaillod fait construire un nouvel hôtel de ville (maison de commune) et en profite pour afficher fièrement ses armes sur le fronton du bâtiment. La représentation de 1761 est particulièrement riche : la croix pattée y est « pleine » (ses bras sont élargis) et porte un croissant en son centre, le tout placé dans un cartouche couronné d’une couronne ducale et soutenu par deux lions comme tenants. Ces éléments décoratifs (couronne, lions) ne font pas partie du blason officiel, mais montrent le soin apporté à la mise en scène héraldique.
Fait notable, les couleurs observées à cette époque diffèrent de celles d’aujourd’hui : les armoiries peintes en 1761 dans la salle de l’Hôtel de Ville sont décrites comme « d’argent à la croix d’azur chargée d’un croissant d’or ». Autrement dit, le champ était blanc (argent) et la croix bleue, avec le croissant doré au milieu. Ce choix de bleu pourrait avoir été influencé par les couleurs des princes de Neuchâtel de l’époque (la maison d’Orléans-Longueville, dont le bleu et l’or étaient des teintes prisées), ou simplement par l’esthétique du moment. En 1767, lors de la construction d’un nouvel abattoir communal, les autorités locales gravent à nouveau le blason accompagné des noms du lieutenant de commune et des gouverneurs en exercice, confirmant que cet emblème était bien ancré dans la vie publique.
Malgré ces variations historiques, les motifs de base, la croix pattée et le croissant, sont restés constamment associés à Cortaillod au fil des siècles. À la fin du XIX siècle, dans un contexte de redécouverte et de codification des armoiries communales en Suisse, la commune a officialisé la version définitive de son blason. Les Annales héraldiques suisses indiquent que les armoiries de Cortaillod, déjà attestées au XVII siècle, ont connu des variantes de couleurs, de forme de croix et de position du croissant, jusqu’à être fixées dans leur forme actuelle en 1881. Cette stabilisation s’inscrit dans le cadre de la loi cantonale du 5 mars 1888 qui a établi officiellement les blasons communaux neuchâtelois, confirmant ou ajustant les anciens emblèmes pour chaque localité.
À Cortaillod, on a retenu le fond sinople (vert), plutôt que le blanc ou le bleu précédemment vu, combiné à la croix d’argent et au croissant d’or placés par-dessus. Depuis cette homologation, le blason de Cortaillod n’a plus changé et reste utilisé tel quel par les autorités communales (par exemple sur les documents officiels, la papeterie, le site web de la commune, etc.), perpétuant une tradition visuelle vieille de plus de trois siècles.